LES CONTRADICTIONS DE L'EXPERTISE ET L'EXPERTISE CONTRADICTOIRE
Séance animée par : Andrée MARQUET
- 14h15– 17h00 Rémi BARBIER, Professeur de sociologie à l'École nationale du génie de l'eau et de l'environnement de Strasbourg, Chercheur au Cemagref
« L'expertise vue d'en bas. Une approche du rapport profane aux experts et à leurs productions »
On se propose d’apporter quelques éléments de réflexion sur le rapport profane aux expertises, plus précisément dans le cadre de leur usage dans les politiques territoriales comme la gestion de l’eau ou des déchets. On montre que la confrontation au territoire et à ses habitants opère une triple mise en tension. En premier lieu, la réception de l’expertise est susceptible de déplacer les frontières initialement retenues pour définir le collectif expertisé ; en second lieu, elle met en cause l’espace de calcul nécessaire à l’expertise, en suspendant une partie des équivalences nécessaires à son fonctionnement ; enfin, elle met à l’épreuve le régime de véridiction de l’expertise, en faisant varier les règles qui définissent ce qu’est un expert et une connaissance utile à l’action.
La conférence
Le débat
Denis ZMIROU-NAVIER, École des Hautes Études en Santé Publique et Université de Nancy
« Du contradictoire dans l'expertise scientifique : chacun à sa juste place »
L’expertise en santé publique consiste à rassembler et évaluer les données scientifiques disponibles à un moment donné sur le danger et les risques pour la santé liés à un agent, un milieu, un comportement ou une organisation, et sur les moyens de maîtriser ces risques, en vue de rendre ces informations utilisables par des instances en charge de leur gestion. Diverses parties sont concernées et souhaitent pouvoir intervenir dans le cours de ce processus. Parce que le risque est à la fois un objet scientifique et politique, cette demande est fondée. Pour autant, il importe que soient explicitées les différentes étapes de l’ensemble du processus conduisant à une décision en matière de risque. La phase de l'expertise scientifique en est une composante, qui a ses règles et acteurs propres. L’évaluation puis l’analyse du risque, comme sa gestion, appellent une claire délimitation des rôles des différents acteurs pour que leurs responsabilités respectives puissent être attribuées. L’approche « procédurale » de l’expertise satisfait le mieux les objectifs d’objectivité, de transparence et d’attribution des responsabilités. La communication traitera spécifiquement des risques pour la santé liés à l'environnement.
La conférence
La présentation Powerpoint : D.Zmirou-Navier
Le débat
Denis BARD, Enseignant-chercheur en santé environnementale, École des Hautes Études en Santé Publique, Rennes
« Divergences de conclusions d'experts et incertitudes scientifiques sur les effets des faibles doses »
Dans le domaine de la santé environnementale, souci grandissant dans notre société, les conclusions de tel ou tel groupe d’experts divergent fréquemment sur les impacts de l’exposition des individus à un agent peut-être nocif, alors que la nocivité intrinsèque de l’agent considéré fait consensus. Le problème est en fait celui des effets d’exposition à de faibles doses, situation très commune dans le champ de la santé environnementale. Comme les effets de ces doses ne peuvent être directement observés, il est nécessaire d’effectuer des transpositions et extrapolations pour estimer les impacts. Les bases scientifiques et les hypothèses retenues doivent être strictement distinguées. Les choix alternatifs d’hypothèses par les experts expliquent au final les divergences d’interprétation des connaissances scientifiques.
La conférence
La présentation Powerpoint : D.Bard
Le débat
L'EXPERT, LE CITOYEN, LE POLITIQUE
- 17h00 – 18h00 Jean-Yves LE DÉAUT , Député de Meurthe-et-Moselle
« Le savant, le politique et le citoyen »
Le temps n’est plus celui où les technologies peuvent être imposées par les seuls experts. Le citoyen souhaite qu’un dialogue effectif précède toute décision. Le rejet des OGM dans le grand public, en France et en Europe, en est la preuve.
Mais comment en est-on arrivé là ? Les OGM sont-ils le mal absolu, comme le prétendent les « faucheurs volontaires » ou ne sont-ils que les victimes expiatoires désignées des déboires écologiques des pays développés ?
A travers cet exemple, je voudrais montrer comment l’Office Parlementaire d’Evaluation des Choix Scientifiques et Technologiques (OPECST), - regroupant 36 députés et sénateurs - a innové, en faisant dialoguer tout d’abord profanes et experts, en organisant la première conférence de citoyens en France en 1998 et d’autre part, en confrontant l’avis d’experts entre eux pour vérifier la validité de leur thèse. L’OPECST a joué un rôle de pionner dans la promotion de l’expertise publique collective et contradictoire. Dommage que dans le même temps, les médias aient joué un rôle simplificateur en souhaitant toujours une réponse par blanc ou par noir sur des sujets complexes.
Ce dialogue entre le savant, le politique et le citoyen ne doit en aucun cas être un alibi pour justifier des décisions prises. C’est à cette seule condition que le politique pourra prendre des décisions acceptées par tous.
La conférence